Abuja, 31 octobre 2023 — La Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a condamné la République de Guinée pour violation du droit à l’information et de la liberté d’expression, à la suite des coupures d’Internet et du blocage des réseaux sociaux intervenus lors de la présidentielle d’octobre 2020. Une décision qui marque une victoire historique pour l’Association des Blogueurs de Guinée (ABLOGUI) et ses partenaires à l’origine de la plainte, saluée comme une avancée majeure pour la liberté numérique dans la région.
La procédure avait été initiée en juillet 2021 par un collectif d’organisations de la société civile, parmi lesquelles l’Association des Blogueurs de Guinée (ABLOGUI), l’Association Villageoise, la Ligue Guinéenne des Droits de l’Homme (LIGUIDHO) et le Centre Africain de Formation et d’Information sur les Droits Humains et l’Environnement (CAFIDHE).
Ces organisations dénonçaient les coupures arbitraires d’Internet et le blocage de plateformes comme Facebook et Twitter (devenu X), qu’elles considéraient comme une tentative délibérée de restreindre l’espace civique et d’étouffer les voix dissidentes pendant un scrutin crucial pour la démocratie guinéenne.
Des atteintes graves aux libertés fondamentales
Dans leur requête, les plaignants ont soutenu que ces restrictions avaient porté atteinte non seulement à la liberté d’expression, mais aussi à la liberté de la presse et à la participation citoyenne au débat public. La Cour de justice de la CEDEAO leur a donné raison, estimant que l’État guinéen n’avait apporté aucune justification valable à ces interruptions. Elle a conclu que la Guinée avait violé l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples garantissant le droit à l’information et l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui consacre la liberté d’expression.
Dans son arrêt, la Cour a rappelé que toute restriction de l’accès à Internet doit être « nécessaire, proportionnée et fondée sur une base légale claire ». En l’absence de ces conditions, la Guinée a été jugée responsable de la violation des droits fondamentaux de ses citoyens.
Si aucune compensation financière n’a été accordée, la Cour a ordonné à l’État guinéen de prendre des mesures concrètes pour éviter la répétition de telles violations et de garantir un environnement sûr pour les journalistes et les défenseurs des droits humains.
Une victoire symbolique pour la liberté numérique
Pour l’Association des Blogueurs de Guinée (ABLOGUI), cette décision représente une reconnaissance majeure de son combat pour un Internet libre et citoyen. L’organisation a réaffirmé son engagement à poursuivre le plaidoyer pour une gouvernance numérique inclusive et respectueuse des droits humains. « Cette victoire dépasse les frontières de la Guinée. Elle pose un jalon pour toute l’Afrique de l’Ouest dans la défense des droits numériques », estime un membre d’ABLOGUI.
L’arrêt de la Cour de la CEDEAO constitue désormais une référence en matière de protection des libertés numériques sur le continent. Il envoie un message clair aux États de la région : couper Internet ou restreindre l’accès aux réseaux sociaux constitue une atteinte grave à la démocratie et à la participation citoyenne.
Grâce à cette décision, l’ABLOGUI, à côté de ses partenaires, s’affirme davantage comme un acteur clé du plaidoyer régional pour la liberté numérique et la gouvernance ouverte.

